1.7.1. Déterminer la qualité d’une visualisation#
Certaines cartes ou diagrammes sont clairement meilleurs que d’autres. Mais la qualité d’une visualisation de données dépend de plusieurs facteurs et ne peut pas être réduite à quelques règles strictes. L’efficacité d’une carte n’est pas seulement déterminée par sa conception intrinsèque, mais elle dépend également du public cible et de l’objectif de la visualisation. Une carte dans un journal spécialisé et destinée à des experts ne convient pas nécessairement à un public large.
Certains graphiques et cartes fonctionnent bien parce qu’ils avaient été faits sur la base de bonnes décisions esthétiques. Mais une bonne décision nécessite d’un côté une certaine expérience et un goût de l’esthétisme, choses pour lesquelles il est difficile de déterminer des règles systématiques et claires. Mais l’efficacité d’une visualisation n’est pas seulement basée sur l’esthétisme et du bon goût, mais elle est également liée à la perception visuelle humaine. Plutôt que de se baser sur des normes esthétiques qui évoluent dans le temps, il est important de comprendre la relation entre la nature des données et les caractéristiques d’une visualisation au niveau de la perception. Cette compréhension permet de faire les bonnes décisions lors de la création d’une carte, et ainsi obtenir un résultat efficace et esthétique à la fois.
Il est important de réaliser que l’humain est capable de voir certaines choses beaucoup plus facilement que d’autres. Ces différences cognitives font que certaines cartes sont beaucoup plus faciles à interpréter que d’autres. Mais la cognition et perception sont aussi importantes à un autre niveau. En effet, l’humain a tendance à interpréter les relations entre les objets qu’il voit, et ceci même inconsciemment. Ceci influence suivant comment l’interprétation d’une carte. L’arrangement de points, de lignes ou de symboles sur une page peuvent donner lieu à des interprétations sur des similitudes, regroupements ou même des relations cause à effet. Une carte qui arrive à exploiter les forces humaines dans la cognition et la perception sera du coup beaucoup plus facile à interpréter et plus efficace qu’une carte qui va à l’encontre de la cognition et la perception.
Mais comment peut-on mesurer la qualité d’une carte, ou d’une visualisation en général? Pour cela, on définit généralement 3 critères, parfois encore plus. Pour comprendre la mesure de ces critères, il faut se rappeler que chaque carte a été créée avec un but précise. Ainsi, on peut définir une tâche typique pour laquelle la carte devrait être l’outil approprié pour l’accomplir. Chaque carte est donc évaluée dans un contexte précis. Voici les 3 critères principaux:
L’efficacité (effectiveness en anglais) mesure si une carte est comprise correctement par les lecteurs. Ceci peut être mesuré en donnant une tâche précise à des personnes test et d’évaluer si la réponse donnée est correcte.
L’efficience (efficiency en anglais) mesure combien de temps est nécessaire pour accomplir la tâche impliquant la lecture de la carte. On peut mesurer l’efficience en donnant une tâche précise à des personnes test et d’évaluer le temps nécessaire pour arriver à une réponse (indépendamment du fait si la réponse est juste ou fausse).
La confiance (confidence en anglais) détermine si le lecteur de la carte pense s’il a pu accomplir la tâche impliquant la lecture de la carte avec succès. Évidemment, la personne peut être confiante d’avoir obtenu un résultat correct, même si le résultat est faux en réalité. La justesse du résultat est évaluée par l’efficacité, c’est donc autre chose.
Une bonne carte est donc efficace (le lecteur obtient le bon résultat), efficiente (il obtient le résultat en peu de temps) et donne une confiance élevée pour un résultat juste.
Les deux premiers critères sont par ailleurs complètement indépendants. En effet, en principe il est tout à fait possible d’obtenir un résultat juste en peu de temps avec une carte extrêmement moche (à ne pas confondre avec une carte fausse!). Par contre, le lecteur de la carte ne sera probablement pas confiant dans sa réponse dans le cas d’une carte moche. En effet, plus une carte est jolie et bien faite, plus on aura de la confiance. Par contre, on fera suivant comment aussi confiance à une carte qui est jolie mais fausse. Donc prudence…!
L’évaluation de ces critères se fait en principe en comparant plusieurs versions de la carte ou de la visualisation. Ainsi, on peut déterminer laquelle des versions est la meilleure. Une évaluation absolue sur la qualité d’une carte n’existe pas en raison des différences importantes entre visualisations. On ne peut en principe uniquement faire des évaluations comparatives. En principe, on va essayer de recruter un nombre relativement important de personnes afin d’obtenir des résultats parlants et statistiquement significatifs. La détermination de la qualité d’une visualisation nécessite donc un investissement important de temps et d’effort. Heureusement, cela n’est souvent pas nécessaire, car avec le temps, un nombre relativement important d’évaluations a permis de trouver des règles relativement simples qui permettent, si elles sont respectées, de créer une carte tout à fait raisonnable.